Excuse my french

vendredi 2 septembre 2011

COUP DE BOULE : Arsène W., gentleman cambrioleur ?

Un bronze qui coule, ça peut être douloureux. Même si, après coup, on peut l'envisager comme un soulagement.
Un matin de 2008 de ce qu'on croyait être un beau jour (tu parles, Adidas nous invitait à assister à un France-Italie de l'Euro suisse) mais qui allait en fait se révéler tout pourri (vous pensez, le 0-2 de triste mémoire avec l'expulsion-penalty d'Abidal), on a été présenté à Arsène Wenger dans une antichambre d'Orly. Et on a failli en faire pipi d'émotion. Supporter d'Arsenal depuis 1996, m'sieur ! "C'est bien, continuez" commenta le grand homme (1,91 m) avec la légendaire distance affable qui participait de sa classieuse anomalie dans ce monde de brutes à cure dent qu'est grosso modo le foot. Notre mémoire continuait de polir avec ravissement cette phrase fulgurante - qui ne nous aurait pas fait moins d'effet qu'avoir l'oreille tirée par Napoléon en 1805 - quand quelques évènements sont venus gâcher le succulent souvenir.
Un quadra myope avec un nom de voiture : c'est à la lumière de ce genre
de recrutement aberrant qu'on se dit qu'un manager perd les pédales.
Bref rappel des faits qui fâchent : vendredi dernier, Chu Young Park, le joueur de Monaco, est à Lille pour passer la visite médicale, préalable à la signature d'un contrat avec le club champion de France. Il est convenu que le Sud-coréen doive passer la fin de ses tests le lendemain. Mais la cause - et les détails du transfert - semble entendue. Le samedi matin, un représentant du LOSC se pointe à l'hôtel du joueur pour s'entendre dire que ce dernier vient de faire son check out. Instruit des rumeurs faisant état d'un intérêt tardif d'Arsenal pour leur trouvaille, les Lillois se ruent à la gare où ils trouvent Park au pied de l'Eurostar. Justification penaude : le club londonien a surenchéri dans la nuit auprès de Monaco.A l'heure du petit déjeuner, adieu donc l'ami de Corée. Bon. Les manquements d'un joueur à sa parole se sont multipliés ces dernières années. Souvent, c'est le club "mieux-disant" qui lui prêtait un mouchoir à placer pudiquement sur le savoir-vivre. Le choc est qu'un gentleman comme Arsène Wenger encourage ces comportements de gredins. Car jusqu'alors, l'Alsacien posait bien plus volontiers dans la posture de la vierge outragée, composition victimaire rodée depuis la fugue de la caillera Anelka au Real en 1999. Et ce même si, plusieurs coups de cisaille dans le grillage de poulaillers européens pour chiper quelques jeunes coqs de concours avaient déjà fait froncer des sourcils aux observateurs tatillons.
Cette surenchère délirante (L'Equipe assure que Monaco s'est vu offrir 12 millions d'euros alors qu'un deal avait été scellé avec Lille pour 3 !) traduit une fébrilité étonnante chez celui qui fait toujours figure de Top coach européen. Nasri et Fabregas voulaient partir ? Il a fait mine de l'ignorer avant de céder. Et peu importe si cette stratégie lui a permis d'encaisser un plus gros chèque. L'effet désastreux est que son équipe, étoffée in extremis (avec outre Park, les arrivées de Mertesacker, Arteta et Benayoun) en sort affaiblie.
Des remplaçants goguenards qui jouent à la PSP  devant des tribunes désertées
(car hors de prix) : une image inconcevable à la grande époque de Wenger.
En fait, c'est toute la stratégie échafaudée il y a quelques années par Wenger qui parait en perdition. Son plan ?  Dégoter de très jeunes joueurs prometteurs et bon marché afin d'investir l'argent économisé dans la construction d'un stade dont Arsenal pourra tirer de juteuses ressources lui assurant son autonomie financière et sa prospérité à long terme, une fois le "fair play" financier imposé par Michel Platini aux grands clubs surendettés. Alors certes Arsenal possède désormais l'Emirates Stadium. Mais - à mille lieues des temples 100% british de Manchester ou du... Bayern - c'est une lugubre copie du Stade de France, orpheline de l'ambiance old school du regretté Highbury dont les places, hors de prix (plus chères qu'à Chelsea la bourgeoise !) sont réservées aux plus aisés. Arsenal n'est plus le club populaire des faubourgs nord de Londres immortalisé par Nick Hornby, qu'il était il y a encore dix ans. Ajoutant la honte à la trahison, ce n'est même plus un club triomphant - "souleveur d'argenterie" comme disent les Rosbeefs - puisque les jeunes sensés marcher sur les brisées de la génération Pirès-Vieira-Henry n'ont jamais su rivaliser avec leurs aînés. Ni faire oublier qu'ils n'étaient pas Anglais. Et c'est un autre échec terrible d'Arsène Wenger : quand le centre de formation de Manchester United semble une mine d'or inépuisable, celui des Gunners apparait incapable de produire les joueurs de plus d'1,70 mètre pouvant dissuader le boss de leur préférer de braves transfuges de Ligue 1, un peu moins tendres pour affronter ces virils jeux de quille british qui transforment l'infirmerie d'Arsenal en service pédiatrique bondé. Pour un Wilshere, voire un Walcott, combien d'"espoirs" bientôt envoyés solder leurs rêves rouges et blancs dans des clubs de seconde zone ?


Ce qu'on adorait dans l'Arsenal de la grande époque (1996-2004), c'était cet improbable attelage d'un garçon coiffeur moustachu (Seaman), de rugueux briscards anglais (Adams, Winterburn, Dixon, Bould) plus ou moins sauvés de leur ivrognerie culturelle, de milieux continentaux techniques mais gaillards (Vieira, Petit, Ljungberg, Gilberto) et d'artistes en première ligne (Bergkamp, Overmars, Henry, Pirès, Wiltord). Et c'était le génie de l'Alsacien d'avoir fait de tout ça une équipe sublime, ultra puissante, rapide et inspirée, aboutissant aux chef d’œuvre de 2002 et 2004 : un doublé  puis une première place accompagnée d'une invincibilité durant 49 matchs.
Alors certes une telle génération ne se trouve pas sous les crampons d'un bourrin de West Ham mais Wenger aurait pu, -aurait du - trouver les solutions pour maintenir la compétitivité de son club. Et préserver son identité. Pour le Canonnier en chef, il est peut être bientôt temps de faire parler la poudre. D'escampette.

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